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Mais quelle comédie ! Quelle comédie cela peut-être lorsque autrui nous écoute, ou en tout cas le prétend… Quelle tendre gesticulation, quel ballet de bons mots, quelle débauche de jolies tournures et de sympathiques intentions c’est parfois. Et si elle est accompagnée d’un soupçon d’arrogance, d’un petit « tu as bien fait de venir me voir » (sous entendu « toi-qui-ne-sais-rien et moi-le-sauveur-qui-sait-tout… »), la rencontre avec l’autre peut tout à fait prendre la tournure d’une leçon du maître à son élève, du scientifique à l’ignorant, du raffiné au vulgaire… Mais, alors que derrière le masque apparent de l’écoute et de la compassion de l’autre se dissimulent souvent à peine ses propres névroses et sa propre impuissance à s’en libérer, notre nous-même semble bien vouloir se résigner à rester à l’abri, tapis dans l’ombre d’un « non exprimé » conscient ou pas encore tout à fait. Est-il réellement possible de se sentir tout à fait compris ou au moins vraiment écouté quand on reçoit la plupart du temps, sans l’avoir même demandé, des conseils avisés sur ce qu’il faut ou ne faut pas faire ?
Car face à une préoccupation qui concerne notre « vivre » ou notre « ressentir », nombre de nos contemporains sont absolument convaincus que « faire » est la bonne, la seule, la véritable réponse. Finalement, n’y a t-il pas qu’à changer, aller, supprimer, quitter, partir, demander, exiger, ou même abandonner ?… Comme si ces petites recettes miraculeuses à suivre comme des « pas à pas culinaires » pouvaient véritablement faire disparaître les maux qui nous agitent. Bien entendu personne ne s’émeut du fait que cela contribue surtout à réduire notre propre vécu de la situation, notre perception intime, à quelque chose de peu d’importance, de commun, de tout à fait banal – qui arrive à tout le monde -…
[quote align= »center » color= »#999999″]Cette illusion de simplicité, du « c’est pareil pour tout le monde » semble une idée solidement enracinée dans les esprits[/quote]
Cette illusion de simplicité, ce raccourci du « général », du « c’est pareil pour tout le monde » semble une idée solidement enracinée dans les esprits, et nombre d’« aidants », « écoutants » professionnels ou non, qu’ils soient nos amis, nos parents, nos soignants mêmes, s’y réfèrent souvent… Pourtant il faut bien se dire que ce n’est pas parce que nous utilisons des mots communs pour décrire les choses qui nous habitent, que ces choses nous habitent tout à fait de la même manière. Si les signes extérieurs des énergies qui nous parcourent, des émotions qui nous agitent, ont d’indéniables ressemblances d’un visage à un autre, leurs origines sont, à l’inverse, une combinaison absolument unique d’évènements, de vécus de ces évènements, de projections, d’interprétations, de désirs et de besoins tout à fait personnels…
Une tristesse, ta tristesse, sa tristesse, ma tristesse naissent dans autant d’univers singuliers, peuplés de créatures inconnues, et étrangers les uns aux autres.
[quote align= »center » color= »#999999″]« Quoique l’on s’accorde en général à reconnaître sans difficulté la diversité des âmes humaines, on n’en oublie pas moins perpétuellement dans la pratique que l’autre est en réalité un autre être, dont les sentiments, les pensées, les perceptions et les désirs sont différents des nôtres. » C.G. Jung – L’homme à la découverte de son âme[/quote]
Alors, bien sûr, on rencontre beaucoup de gens qui disent nous reconnaître une individualité propre, une différence ; mais cela ne les empêche pourtant pas de répondre à certaines de nos demandes d’aide, en commençant par « si j’étais vous… ». Ainsi, qu’il s’agisse de l’éducation nationale, de la médecine, de la publicité… mais aussi de nos familles, de nos cercles d’amis ou de nos connaissances, tout le monde nous dit (dicte ?) en permanence ce que nous devons faire ! Pour faire de « bonnes » études, pour être en « bonne » santé, pour faire de « bons » achats, pour trouver de « bonnes » solutions à nos problèmes… Mais dans toute cette multitude de gens qui ne veulent que notre « bien », qui sait réellement ce qui est « bon » pour nous, individuellement, intimement, viscéralement ?
D’ailleurs on fini par ne plus très bien savoir nous-même, à force d’ingurgiter et de faire siennes ces valeurs communes, édictées en une sorte de loi unique reconnaissant à l’avis des autres une supériorité absolue sur notre expérience propre. Ce que tout le monde dit comme étant « bien » et ce que tout le monde dit comme ne l’étant pas, voilà ce que nous pensons être la vérité à apprendre, voilà ce à quoi nous nous soumettons, au prix de douloureux sacrifices parfois, mais… « C’est la vie », comme on dit.
Alors, quel fou ce Carl Rogers ! Quelle idée tout à fait insolente que de vouloir libérer chez les gens la capacité de ressentir, de penser et de dire ce qui est « bon » pour eux, alors que pendant des siècles nombre de religions dogmatiques, nombre d’intellectuels, d’érudits, et de formes de pouvoir, ont inventé et déployé tellement de choses pour guider (manipuler ?), pour encadrer (enfermer ?) la pensée, pour l’entraîner dans un commun rassurant et surtout maîtrisé. Quelle révolution dans notre monde si organisé, si régenté, si politiquement correct, que de venir tromper l’hégémonie des donneurs de leçons, en posant directement sur les terres d’une science d’éminents spécialistes (voire, pour certains, de grands ayatollahs) – la psychologie -, les bases d’une pratique qui pourrait s’articuler, en résumant, autour d’une question à la fois si simple et pourtant si difficile à mettre en œuvre : y a-t-il plus grand « savant » capable de saisir, sentir et comprendre en détail les comportements d’autrui et ce qui s’y vit, qu’autrui lui-même ?
[quote align= »center » color= »#999999″]C’est-à-dire que le rôle du thérapeute n’est pas d’essayer de comprendre à la place de l’autre[/quote]
C’est-à-dire que le rôle du thérapeute n’est (surtout) pas d’essayer de comprendre à la place de l’autre, mais plutôt de l’aider à être en contact avec ce qu’il vit, afin que lui-même puisse mieux se comprendre. C’est précisément cette idée là, que je trouvais un peu folle et carrément provocatrice, qui m’a attiré parmi les Rogériens, autant par rébellion vis à vis des systèmes dogmatiques que par une grande curiosité, curiosité soutenue par une intuition viscérale. Je dois bien dire aujourd’hui que plus j’avance dans mon parcours personnel autant que dans ma formation, et plus cette idée me paraît être – au contraire des grandes théories pourvoyeuses de leçons toutes faites – d’un authentique pragmatisme et d’une grande sagesse… Mon histoire personnelle autant que mon parcours de formation dans cette première année de cycle 2 n’ont fait qu’ancrer en moi la conviction profonde que pour aider quelqu’un à retrouver son chemin à travers ses brouillards et ses tempêtes intérieures, un bon point de départ consiste à l’aider d’abord à se retrouver lui-même.∗
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Voilà, la nouvelle forme est en cours de finalisation… J’espère qu’elle plaira. J’ai voulu quelque chose de plus aéré, qui fasse la part belle aux textes. A suivre…
Merci pour ta réponse Marie. Je suis d’accord avec toi, la forme n’est pas encore tout à fait en accord avec le fond et ne peut qu’évoluer (c’est du « fait maison »)… En revanche, c’est vrai que je n’avais pas prêté attention à l’effet « strict », alors je note cette remarque et vais essayer d’adoucir tout ça !
Le texte est agréable à lire et d’une compréhension facile. Par contre la vue de l’ensemble fond blanc tour vert très pâle me reppelle un coté hospitalier. Peut etre la forme va évoluer ? Ta présentation est pour moi stricte et même un peu dure. Je ne retrouve pas cette legerete que tu as la chance d’avoir avec l’écrit…