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Jean qui rit et Jean qui pleure…. C’est vrai qu’ils passent du rire aux larmes en quelques secondes… Les enfants ne se départissent qu’en vieillissant de cette spontanéité qui nous fait sourire, et nous attendrit autant qu’elle peut nous déstabiliser, nous déranger même parfois. Car quand elle vient faire vaciller nos schémas établis, nos conventions d’adultes, nos petits arrangements avec nous-mêmes, elle met en danger une construction psychologique de plusieurs années, un système complexe d’évaluation et de censure, une sorte de déséquilibre précaire que nous mettons – inconsciemment ou non – beaucoup d’énergie à conserver malgré nous.
Pourquoi les jeunes enfants ont-ils cette faculté, qui semble si naturelle chez eux, de dire avec autant de simplicité ce qu’ils vivent, ce qu’ils ressentent dans chaque situation, dans chaque relation ?
Car plus que la vérité au sens général du terme, c’est surtout leur vérité qu’ils sont capables d’exprimer sans détours et sans se préoccuper de ce que vont en penser les autres. D’ailleurs, ne se cache-t-il pas parfois, dans les tendres éclats de rire que leurs réactions spontanées provoquent chez nous, un soupçon de jalousie ? Oui, je crois qu’au fond, nous les envions beaucoup. Mais alors, pourquoi et surtout comment avons-nous perdu cette capacité ? Sommes-nous devenus un peu moins « humains » que nos enfants ? Est-ce que nous ne « nous sentons » plus, ou bien est-ce que nous n’arrivons plus à « nous dire » ? Le développement de nos connaissances et de notre raisonnement a-t-il fini par faire de nous des étrangers de nous-mêmes ?
La théorie de la personnalité selon Carl Rogers
Ce questionnement me permet d’introduire une réflexion autour de la théorie du fonctionnement de la psychothérapie Rogérienne. Et pour en comprendre le fonctionnement, il est intéressant de s’intéresser au mécanisme qui participe à créer le déséquilibre qu’elle va tenter d’inverser. Pour décrire et expliquer ce mécanisme, Carl Rogers a formulé ce qu’il appelle la « théorie de la personnalité ». Cette « théorie » prend corps (et tout son sens) autour de l’idée de fond suivante : de l’enfance à l’âge adulte, nous nous éloignons de notre perception propre des choses, et de l’évaluation, de l’expérience que nous faisons, intimement, de ces choses (ce que ROGERS appelle le « moi organismique »).
[quote align= »center » color= »#999999″]Pour faire nos choix, nous nous en remettons de plus en plus en grandissant, aux critères d’appréciation de personnes que nous considérons comme références[/quote]
Pour faire nos choix, nous nous en remettons de plus en plus, au cours de notre enfance, puis de notre adolescence (et ce phénomène peut se poursuivre ensuite toute la vie sans que la personne n’en prenne jamais conscience…), à un « centre d’évaluation » périphérique, une sorte de construction mentale stable et permanente assemblée à partir d’une somme de critères d’appréciation de personnes que nous considérons comme références. Parmi ces personnes « références » il y a souvent les parents bien sûr, mais aussi des gens que nous aimons, et des gens que nous admirons, des gens que nous rêverions d’être… Enfin, il y a dans ce « filtre » composite l’image que nous avons ou que nous voulons avoir (ce qui revient au même) de nous même… Notre moi idéal. Mais pourquoi choisissons nous de faire autant confiance à cette « composition », à cette « invention » qui est bien moins issue de notre propre « chair » qu’élaborée mentalement à partir de nos interprétations de ce que pensent les autres, de ce qu’ils nous renvoient dans les relations que nous avons avec eux ?
Pour l’Amour des autres
Pour être aimé de ces autres! Et cette quête originelle, permanente, infinie, d’amour et de reconnaissance de ceux qui sont importants pour nous, ces fameuses personnes « référence », nous pousse à faire les choses comme ils aiment les faire eux-mêmes, nous pousse à dire ce qu’ils apprécient d’entendre, nous pousse à aimer ce qu’ils aiment, à penser ce qu’ils pensent, à trouver bien ce qu’ils trouvent bien et mal ce qu’ils pensent être mal… Dans cette logique, nous nous habituons, nous nous adaptons au fait que nos relations aux autres, et l’accueil, l’amour et la reconnaissance qu’ils nous offrent soient finalement un peu (ou complètement) conditionnés.
[quote align= »center » color= »#999999″]La voix familière de votre mère qui dit quelque chose comme « si tu veux faire plaisir à ta maman, ne fait pas cela… »[/quote]
En lisant cela n’entendez vous pas résonner quelque part au fond de vous la voix familière de votre mère qui dit quelque chose comme « si tu veux faire plaisir à ta maman, ne fait pas cela… », ou encore « si tu aimes ta maman, fais cela… » ?
C’est ainsi qu’en cherchant continuellement à « plaire » ou à ne pas « déplaire » à ceux qui comptent, notre propre expérience des choses devient de moins en moins audible à mesure que nous passons de l’enfance à l’âge adulte, à mesure que nous faisons nôtres les valeurs d’autrui, que nous les introjectons. Ce mécanisme d’aliénation au regard de l’autre nous coupe donc petit à petit, insidieusement, de notre propre vécu, la subjectivité du regard des autres se substituant de plus en plus à l’objectivité de notre propre expérience.
Ainsi, parce que nous avons peur de ne pas être aimés, nous négligeons malheureusement ce qui est, depuis notre naissance, notre meilleur allié pour traverser la vie : notre capacité sensorielle, émotionnelle, charnelle, de déterminer ce qui est « bon » pour nous-même, pour ce que Carl Rogers appelle le « moi organismique ».
Et notre expérience, notre ressenti, notre vécu des choses, est sans doute la donnée la plus authentique, la plus vraie, la plus proche de nous-même à laquelle notre conscience peut avoir accès. Elle est en nous à chaque instant, c’est notre moyen le plus fiable de savoir ce dont nous avons vraiment besoin et de faire nos propres choix en conséquence. Quel dommage que nous passions – inconsciemment – une aussi grande partie de notre temps à la mettre en doute, à l’ignorer, ou même à l’oublier complètement…∗
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